mercredi 19 mai 2021

Maximilien Dotsé Amegee, un peintre moderne à la croisée des chemins



« Il faut avoir une haute idée, non pas de ce qu'on fait, mais de ce qu'on pourra faire un jour; sans quoi ce n'est pas la peine de travailler. »

(Edgar Degas, 1834-1917)

« Il ne s’agit pas de peindre la vie, il s’agit de rendre vivante la peinture. »

(Pierre Bonnard, 1867-1947)

 

L’œuvre d’art de Maximilien Dotsé Amegee est la réponse au cri de plusieurs générations d’Africains marqués de fer par l’esclavage, la colonisation, le néo-colonialisme, l’oppression permanente du berceau de l’humanité et du tiers-monde, asservis par l’Occident conquérant : peintre franco-togolais, Pape de la poésie togolaise, avocat au barreau de Paris, fin lecteur de la philosophie, de l’histoire, de la culture africaine et occidentale etc, ses tableaux de génie sont les témoins oculaires, palpables de son époque agitée par des centaines de conflits.

Sa chronique intime des guerres ouvertes ou sournoises qui déciment le monde entier place son art au-dessus de la mêlée : sa transparence intérieure s’élabore au fur et à mesure que se déploient ses couleurs à la manière de Vincent Van Gogh, sa palette retravaillée à l’instar de Paul Cézanne, son modelé mystérieux, résonance de Pierre Bonnard, sa vision fragmentée, sa touche divisée convenablement, sa réappropriation du masque africain, ses noces avec les Massaïs, peuple du Kenya et de la corne de l’Afrique.

Maximilien Dotsé Amegee s’ouvre à la terre habitée pour en extraire la sève vivifiante, refusant tout enfermement, les querelles d’écoles qui se réclament d’avant-garde au point de croire qu’elles ont l’apanage de la vérité : cette soif de l’universel s’épaissit dans son plaidoyer pour la Renaissance africaine, son investissement personnel dans l’éducation nationale en France et au Togo, dans la santé, dans la salubrité publique, dans l’hygiène et l’autosuffisance alimentaires, dans la défense des minorités, des droits de l’homme, des enfants de la veuve, des proscrits bondant les rues, et que sais-je encore.

Sa façon unique d’exalter la beauté de la Femme immortalise sa peinture et lui donne une dimension poétique considérable : Maximilien Dotsé Amegee renouvelle le portrait sans tapage, le blason subrepticement ; il célèbre le mariage sans arrière-pensée, le bonheur conjugal avec héroïsme ; la famille de naissance s’épanouit sous le regard des parents ; il protège les enfants comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes, rendant caduc le thème kafkaïen de l’enfance douloureuse pour tous ceux qu’il isole dans la vertu.

Néanmoins, Maximilien Dotsé Amegee peint aussi des personnages dégradés, l’environnement qu’on détériore, le patrimoine qu’on livre à la ruine comme le wharf de Lomé, adoptant un point de vue réaliste pour faire réfléchir : loin d’être une plate reproduction du réel, ses tableaux montrent la restitution de l’expérience vécue à travers sa mémoire d’éléphant, « l’image fantôme » selon le photographe Hérvé Guibert.

Comme à l’accoutumée, Maximilien Dotsé Amegee aime relever des défis : il se penche de nos jours sur la géométrisation de la toile, à l’instar des Primitifs italiens comme Masaccio, mariant du coup tradition et modernité dans un art entièrement rénové pour la joie du public.

 

         Ananivi Hosé KOUDOUOVOH

         17 mai 2021 – Paris.  

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