« Il faut avoir une haute idée, non
pas de ce qu'on fait, mais de ce qu'on pourra faire un jour; sans quoi ce n'est
pas la peine de travailler. »
(Edgar
Degas, 1834-1917)
« Il ne s’agit pas de peindre la
vie, il s’agit de rendre vivante la peinture. »
(Pierre
Bonnard, 1867-1947)
L’œuvre
d’art de Maximilien Dotsé Amegee est la réponse au cri de plusieurs générations
d’Africains marqués de fer par l’esclavage, la colonisation, le
néo-colonialisme, l’oppression permanente du berceau de l’humanité et du
tiers-monde, asservis par l’Occident conquérant : peintre franco-togolais,
Pape de la poésie togolaise, avocat au barreau de Paris, fin lecteur de la
philosophie, de l’histoire, de la culture africaine et occidentale etc, ses
tableaux de génie sont les témoins oculaires, palpables de son époque agitée
par des centaines de conflits.
Sa
chronique intime des guerres ouvertes ou sournoises qui déciment le monde
entier place son art au-dessus de la mêlée : sa transparence intérieure
s’élabore au fur et à mesure que se déploient ses couleurs à la manière de Vincent
Van Gogh, sa palette retravaillée à l’instar de Paul Cézanne, son modelé
mystérieux, résonance de Pierre Bonnard, sa vision fragmentée, sa touche divisée convenablement, sa réappropriation du masque africain,
ses noces avec les Massaïs, peuple du Kenya et de la corne de l’Afrique.
Maximilien
Dotsé Amegee s’ouvre à la terre habitée pour en extraire la sève vivifiante,
refusant tout enfermement, les querelles d’écoles qui se réclament
d’avant-garde au point de croire qu’elles ont l’apanage de la vérité :
cette soif de l’universel s’épaissit dans son plaidoyer pour la Renaissance
africaine, son investissement personnel dans l’éducation nationale en France et
au Togo, dans la santé, dans la salubrité publique, dans l’hygiène et
l’autosuffisance alimentaires, dans la défense des minorités, des droits de
l’homme, des enfants de la veuve, des proscrits bondant les rues, et que
sais-je encore.
Sa
façon unique d’exalter la beauté de la Femme immortalise sa peinture et lui
donne une dimension poétique considérable : Maximilien Dotsé Amegee
renouvelle le portrait sans tapage, le blason subrepticement ; il célèbre
le mariage sans arrière-pensée, le bonheur conjugal avec héroïsme ; la
famille de naissance s’épanouit sous le regard des parents ; il protège
les enfants comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes, rendant caduc
le thème kafkaïen de l’enfance douloureuse pour tous ceux qu’il isole dans la
vertu.
Néanmoins,
Maximilien Dotsé Amegee peint aussi des personnages dégradés, l’environnement
qu’on détériore, le patrimoine qu’on livre à la ruine comme le wharf de Lomé,
adoptant un point de vue réaliste pour faire réfléchir : loin d’être une
plate reproduction du réel, ses tableaux montrent la restitution de
l’expérience vécue à travers sa mémoire d’éléphant, « l’image
fantôme » selon le photographe Hérvé Guibert.
Comme
à l’accoutumée, Maximilien Dotsé Amegee aime relever des défis : il se
penche de nos jours sur la géométrisation de la toile, à l’instar des Primitifs
italiens comme Masaccio, mariant du coup tradition et modernité dans un art
entièrement rénové pour la joie du public.
Ananivi Hosé KOUDOUOVOH
17 mai 2021 – Paris.